Les récentes élections allemandes leur ont valu une forte exposition médiatique en France, probablement due au départ d’Angela Merkel. Ce fut l’occasion de mieux expliquer un système électoral, assez complexe, qui marie scrutin majoritaire de circonscription et proportionnelle. Cette formule conduit, tout naturellement, à un gouvernement cohérent, reposant sur une coalition de partis qui rédigent et signent un contrat, pour la durée de la législature, ce qui assure, au fonctionnement des institutions, une grande stabilité. Depuis 1949, date de la constitution de la république fédérale d’Allemagne, se sont succédés, en tout et pour tout, huit chanceliers.
Son intérêt réside dans un compromis de gouvernement qui réunit les représentants de 60% à 75% des électeurs. A l’exception des extrêmes – les sociaux-démocrates ne s’allient pas avec la gauche radicale « Die Linke » et les Chrétiens-démocrates refusent toute alliance avec « l’AdD », la droite dure – tout le monde se sent ainsi représenté. Même si les négociations sont parfois longues, la répartition des pouvoirs entre gouvernement, parlement, régions et cour constitutionnelle permet à tous de s’exprimer et de peser sur les décisions, les rendant ainsi légitimes. Conséquence, le taux de participation – 77% lors de la dernière consultation – donne ainsi, à la coalition qui sort des négociations, toute sa légitimité.
Cette organisation des pouvoirs publics permet aussi de poursuivre une politique économique vertueuse qui, alors que les économies françaises et allemandes étaient à peu près comparables, il y a vingt ans, sont aujourd’hui totalement déconnectées. La France souffre de prélèvements obligatoires supérieurs de 10 points de PIB, d’un déficit budgétaire supérieur de 5 points de PIB, d’une balance des paiements fortement déficitaire quand celle de l’Allemagne est excédentaire : cherchez l’erreur !
La France est riche, tout autant que l’Allemagne. Nous sommes un pays plus jeune, plus grand par le territoire et, sans doute, plus créatif que notre voisin. Mais, nous travaillons moins et attendons tout de l’état. Alors, une question se pose. N’est-ce pas le déséquilibre progressif des pouvoirs au profit du seul Président de la République, déséquilibre accentué par la centralisation jacobine qui est la nôtre, qui a transformé notre démocratie en paternalisme d’état ? Car chez nous, pour être élu, il faut promettre de distribuer des fonds publics ; aux corporations de tous poils, aux lobbies catégoriels, aux minorités agissantes et bruyantes. Et, pour garder un semblant de crédibilité, garantir des actions vertueuses, comme la réduction du nombre de fonctionnaires, ce qu’on s’empresse d’oublier, une fois élu. Par contre, les groupes de pression, opiniâtres, savent rappeler les promesses qui leur ont été faites, en matière de dépenses. Si la classe politique, chez nous, est déconsidérée et que l’abstention gagne du terrain à chaque élection, n’est-ce pas parce qu’elle cède à toutes les pressions et qu’elle accepte de gérer le pays au gré de l’addition des intérêts particuliers au lieu de le faire au seul nom de l’intérêt national ?
Il serait temps d’y réfléchir. Un meilleur équilibre des pouvoirs est, sans aucun doute, la bonne formule pour amorcer notre redressement. Notre système majoritaire a du bon, puisqu’il permet, justement, de dégager des majorités. Mais il conduit au pouvoir les représentants de moins de 25% de la population, lesquels s’imaginent, alors, pouvoir régner sans partage. Voilà ce qui nous conduit aux bonnets rouges, aux gilets jaunes, aux antivax, aux anti-pass, aux militants de la contre-culture. Revenons à une lecture gaullienne : un visionnaire à la présidence, élu sur des valeurs plus que sur un programme, un gouvernement responsable devant le parlement, doté d’une majorité forte parce que reposant sur un contrat écrit, des élus locaux responsables et prenant le pas sur les préfets délégués par l’autorité parisienne jacobine. La politique reprendra alors son vrai rôle, dotera le pays des moyens économiques nécessaires à son redressement et permettra à l’initiative privée et à l’entrepreneuriat de jouer leur rôle de création de richesses propres à assurer la prospérité de la population et la solidarité envers les plus défavorisés.