Tous les Cassandre nous promettent une année 2024 difficile sur le plan économique. Baisse moins rapide que prévu de l’inflation ; croissance proche de zéro ; taux d’intérêt toujours élevés ; incertitudes de toutes sortes, conséquences de la résurgence de conflits armées dans plusieurs régions du monde, les chefs d’entreprise sont, à juste titre, perplexes sur la politique à mettre en œuvre.
Comme toujours, la question qui se pose est celle du choix entre création de valeur et réduction des coûts, pour tenter de sauvegarder le bénéfice courant.
Une politique de réduction des coûts, lorsqu’elle est sérieusement engagée, est, par nature, préjudiciable au lien social, qui, par les temps qui courent, n’en a pas vraiment besoin. Compte tenu de la part des frais de personnel, dans les dépenses courantes, elle touche forcément le niveau des effectifs et provoque inévitablement rancœur, dégradation de l’état d’esprit et motivation en berne. Dans une période où le goût du travail n’est pas la priorité de tous, les dégâts peuvent être extrêmement important. Or, l’enthousiasme des salariés est l’un des ingrédients fondamentaux de la réussite des entreprises.
Choisir une politique de création de valeur par les prix ou par l’expansion est donc le choix évident. Mais, c’est un choix malheureusement incertain. Car si les coûts et les frais sont parfaitement prévisibles, le chiffre d’affaires et le niveau des marges, directement dépendants de la compétitivité des produits ou des services que l’on vend, ne le sont pas. Sauf à disposer de très longs carnets de commande, la fiabilité des prévisions, n’est le plus souvent que de l’ordre de quelques semaines, ce qui n’est évidemment pas rassurant.
Alors, politique de réduction des coûts ou politique de création de valeur ?
Je crois, pour ma part, qu’il faut systématiquement choisir une politique de création de valeur, à la condition, bien sûr d’avoir confiance en son offre et d’être en mesure d’en apprécier l’élasticité, en termes de prix et de conditions. Après tout, c’est toujours l’esprit d’entreprise qui doit souffler, même dans les périodes difficiles. Mais, dans le même temps, si ce n’est déjà fait, il faut installer un état d’esprit frugal dans toutes les composantes de l’entreprise et systématiquement bousculer l’ordre établi, traquer les processus inutiles, les habitudes coûteuses et les redondances de précaution. La frugalité au quotidien évite les restructurations cruelles. Les effectifs peuvent alors être mobilisés autour du double projet de création de valeur et de frugalité ordinaire.
Michelin, pendant des décennies, à démontré que cette politique rigoureuse de création de valeur – produits innovants et marketing percutant – pouvait, sans inconvénients, reposer sur une politique de frugalité interne qui confinait à l’avarice. C’est ainsi que le petit poucet de l’industrie pneumatique en est progressivement devenu le leader mondial.
Alors, face à l’incertitude de 2024, pour limiter la casse, concentrez-vous sur vos atouts et gérez au cordeau.