Dans la gestion de la crise sanitaire, gardons-nous de la moindre critique à l’égard du président et du gouvernement. Ils font ce qu’ils peuvent, ni plus ni moins, ballotés au gré des informations complexes et souvent contradictoires, dont ils sont nourris au quotidien.

Il est, par contre, affligeant de constater les écarts considérables que cette crise a fait apparaître au grand jour entre la France, d’une part, l’Allemagne, l’Autriche, les Pays-Bas, la Suisse, le Portugal et tous les pays du nord de l’Europe, d’autre part, tant pour le nombre des victimes que pour les mesures de confinement et leur durée.

Il y là matière à une réflexion approfondie, à la fois sur notre système de santé et dans les mesures extrêmes prises – nous confondons volontiers caporalisme avec autorité –, beaucoup plus sévères que celles de nos voisins.

Si nous ajoutons qu’en matière de soutien à l’économie, nous serons contraints à en faire moins que les autres, compte tenu de l’état délabré de nos finances publiques, le retour à la normale va être, pour le moins, difficile.

Depuis plus de quarante ans, nos gouvernements successifs, et l’actuel n’est pas exempt de reproches sur ce plan, ont laissé dériver les finances publiques par une dépense croissante, en même temps que s’érodait la compétitivité du pays, saignée par une fiscalité confiscatoire.

Aussi nous permettons-nous un conseil : que nos gouvernants tirent la leçon de ce désastre, afin, qu’une fois la crise sanitaire surmontée, ils mettent en œuvre des politiques en rupture avec les mauvaises habitudes du passé et utilisent pour cela des moyens concrets.

On répète à l’envi que la gestion d’un état n’a rien à voir avec celle d’une entreprise. Il existe toutefois des techniques managériales qui ont fait leurs preuves, au niveau des plus grands groupes mondiaux et qui pourraient être déployées utilement. L’une d’elles est le benchmarking. Les cigales que nous sommes, dépensières et insouciantes, feraient bien de s’inspirer des fourmis, pour disséquer leurs bonnes pratiques et les transposer chez nous. Cela permettrait, à la condition que le benchmarking soit conduit par de vrais professionnels et non par des fonctionnaires, dont le seul objectif serait de préserver l’ordre établi, d’évaluer les systèmes qui marchent à l’étranger, d’analyser nos carences et de proposer la mise en œuvre de politiques pérennes et efficaces. Il existe déjà de nombreuses pistes :

  • Un plus grand recours au privé ; dans cette crise, alors que l’hôpital était submergé, l’offre de lits des cliniques indépendantes est restée assez largement méprisée ;
  • Beaucoup plus de décentralisation régionale – le régime local de sécurité sociale d’Alsace-Moselle démontre qu’on peut, à la fois faire mieux et garder des comptes équilibrés – ;
  • Une vraie concurrence entre les établissements hospitaliers, publics comme privés ; ce qui en améliorerait l’efficacité économique mais aussi le statut, la paye et les conditions de travail d’un personnel à fidéliser impérativement ;
  • La chasse à la bureaucratie ; l’effectif des personnels hospitaliers allemands assurant des fonctions administratives est de 24,3% du total quand en France, il est de 35,2%. L’écart est considérable ! Les Allemands font mieux que nous grâce à la gestion de la santé par les Länders et des infirmières sous régime de droit privé, mais avec des salaires de 20% supérieurs aux nôtres. Cherchez l’erreur ! Pour l’anecdote, j’ai reçu récemment l’organigramme de l’ARS de la région Grand Est : 808 fonctionnaires à l’effectif. Aberrant !

Il n’y a pas de traitement idéologique de la santé qui n’est ni de gauche ni de droite mais repose sur la science et sur une bonne gestion des moyens. Faisons ce qui marche ailleurs : adaptons les bonnes pratiques, supprimons les rentes, remettons au travail médecins et pharmaciens fonctionnaires, logés dans des structures administratives – cela vaut aussi pour la médecine du travail –, faisons appel à la responsabilité individuelle, ce qui suppose une très forte décentralisation, rompons avec les rigidités d’une administration jacobine et rebattons les cartes en faveur d’une médecine moins normée, moins réglementée, plus pragmatique et plus centrée sur l’homme que sur les systèmes. Et, remettons-nous, d’urgence, au travail.