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Dans la Grèce antique, le stratège est un magistrat, membre du pouvoir exécutif, dont la charge inclut la conduite des affaires militaires. Il est le Chef des Armées. Les noms de Thémistocle, vainqueur des Perses au détroit de Salamine ou de Périclès, tous deux stratèges brillants, ont traversé les siècles et nous sont toujours familiers.

Le mot « stratégie » a quitté, depuis le siècle dernier, sa connotation exclusivement militaire, pour devenir un des piliers majeurs du vocabulaire du management d’entreprise. Chacun parle aujourd’hui de stratégie, et à tout propos. On l’évalue, on la jauge, on s’en fait une idée, qui est d’ailleurs, assez souvent, loin de la réalité qu’elle recouvre. La distinction entre tactique et stratégie, par exemple, est ténue pour beaucoup, alors que les deux mots recouvrent deux significations bien différentes.

Je vous propose une définition simple de la « stratégie » : c’est la mise en œuvre des moyens et des ressources nécessaires pour aller, d’où l’on se trouve actuellement, vers où on veut être dans un avenir plus ou moins proche.

Cela suppose donc, de la part de l’entrepreneur ou du dirigeant, en l’occurrence le stratège, qu’il soit motivé par une vision de ce qu’il veut que, lui et l’entreprise qu’il conduit, soient dans l’avenir, et qu’il ait quantifié cette ambition au travers d’objectifs concrets.

Une fois le but défini, la stratégie est pour l’essentiel, un chemin qui se suit en fonction des choix opérés en réponse aux trois questions majeures : Qui – à quels clients nous adressons-nous ? Quoi – quels produits ou services leur proposons-nous ? Comment – de quelle manière faisons-nous mieux que nos concurrents ?

La tactique, elle, va consister à interagir au jour le jour avec les inconnues et les surprises de l’exécution stratégique.

Car, et c’est là toute la difficulté d’une stratégie, si le but reste toujours le même et le chemin, une succession de choix, c’est l’exécution qui en fera le succès. On a souvent vu de mauvaises stratégies réussir grâce à une excellente exécution ; on n’a jamais vu une bonne stratégie réussir, quand son exécution était défaillante.

L’un des exemples de stratégie particulièrement réussie est celle de Michelin. En 1912, André Michelin décide de rendre publique sa vision du rôle de la compagnie : « Nous ne faisons pas des pneus ; nous aidons les voyageurs à se déplacer ». La traduction stratégique de cette vision a été la création de guides, de cartes, de plans, de panneaux de signalisation et de bornes, d’autorails même. Plus de 100 ans après, Michelin fait toujours le même métier, poursuit la même vision et sa stratégie se déroule toujours aussi simplement.

Mais comme toute stratégie se fonde aussi sur la maîtrise d’un rapport de forces, il est nécessaire qu’elle évolue au rythme auquel le Chef d’entreprise reçoit des informations nouvelles. C’est pourquoi le stratège, dont la vision ou le but restent une constante, doit savoir en adapter l’exécution et se révéler aussi bon tacticien au fil des obstacles qu’il rencontre sur sa voie. Car, comme le constatait, à son détriment, Napoléon : « Il n’y a que 2 espèces de plans de campagnes, les bons et les mauvais. Les bons échouent presque toujours par des circonstances imprévues qui font souvent réussir les mauvais ».